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Curieux mois de juin sur ce carnet. Quatre articles écrits seulement, mais un nombre de visiteurs qui augmente sensiblement, passant de zéro ou un par jour à deux ou trois. Presque une explosion. Grâce à une écrivain imaginaire, ou peut-être pas, et au travail de Google, the bad boy.

Un seul livre de commenté, mais j'en ai lus plus que cela. Un dont il existe déjà une opinion à laquelle j'ai peu à rajouter. Et un autre que je ne commenterai pas tout de suite, si ce n'est pour signaler que depuis que j'ai entamé sa lecture je fais des listes partout, et que j'arrive enfin à revoir ou rappeler des amis que je risquais de perdre de vue. Enfin un dernier livre, très oubliable, et au sujet duquel je pourrais facilement dire un peu de mal. C'est rare, à cause du soin, maniaque, que je prends à choisir mes lectures, mais tous les livres qui arrivent chez moi ne passent pas par ce processus de sélection.

Quant au mois de juillet qui commence, et qui est déjà bien entamé, il s'annonce sous le signe des vacances. Tout est prêt, ou presque. Les livres à emporter ont soigneusement été choisis, excepté le livre de mathématiques pour lequel j'hésite encore. L'eeepc est préparé, lui aussi, pour recueillir les futurs articles du carnet.

Le rythme de ce blog risque donc d'être un peu ralenti, pendant un mois. Mais ce sera pour mieux reprendre dans les semaines d'après.

Le rythme de mes lectures, lui, a bien redémarré. Ce goût d'indifférence laissé par le précédent roman a été effacé par un Haruki Murikami. Une valeur sûre, dont il ne faut pas hésiter à acheter, ou voler, les oeuvres au hasard, surtout lorsqu'elles sortent en poche. La bonne humeur a été apportée par un roman Tom Sharpe. Un classique.

— La troisième dimension de la vitesse est la plus imperceptible. On la trouve rarement incarnée. Tu es à mes yeux, Caracole, l'un des seuls êtres vivants que j'ai rencontrés qui la donne à voir — par instants, sur quelques éclats, quelques flèches. J'appelle cette vitesse le vif. Elle est adossée, secrètement, à la mort active en chacun, elle la conjure et la distance. Le vif n'est pas relatif à un espace ou une durée. Il n'opère pas un pli ou une déchirure dans un tissu préexistant comme l'opère le mouvement. Il est le surgissement absolu. Il amène, dans un vent, dans une vie, dans une pensée, le plus petit écart. Un minuscule apport, à peine un grain, et tout explose... Il faut comprendre que le n'est rupture qu'en apparence, rupture pour une perception humaine, forcément limitée. En toute rigueur il demeure une transformation continue.

— Le vif c'est autre chose?

— Le vif c'est ce qui t'a fait, c'est l'étoffe dont sont tissées tes chaires, Caracole. C'est la différence pure. L'irruption. La frasque. Quand le vif jaillit, quelque chose, enfin, se passe—

Alain Damasio, La Horde du Contrevent,

Six lances, Dix cibles

Couverture du livre de Ludivine Cissé: Six lances, dix cibles

Un titre superbe, une critique, un peu confuse, mais surtout élogieuse dans un magazine apprécié, accompagnés par deux photos de l'écrivain troublante, un blog mystérieux, les premières lignes du roman sur un site depuis novembre dernier, une couverture qui ressemble à un faux, aucune information chez mon libraire ou sur internet sur la date de sortie...

Et puis hier soir la révélation: ce livre n'existe pas. C'est le magazine Chronicart qui s'est amusé à créer un numéro rempli de faux: des critiques et des interviews, de livres, d'auteurs, de disques, films, de bande dessinées, de tout! qui n'existent pas.

Et moi qui ait voulu y croire, alors même que j'avais la vérité sous les yeux, dans la liste des sorties des Éditions de Minuit jusqu'à la rentrée littéraire...

Le plus drôle, c'est qu'au même moment où je harcelais presque quotidiennement mon libraire pour qu'il me trouve des traces de ce livre imaginaire, j'étais en train de lire les dernières pages du livre Les Falsificateurs.

Troublant.

Il y a bien longtemps que je n'avais plus lu de philosophie. Bienvenue dans le désert du réel de Žižek est un livre de philosophie agréable et facile. Les idées exprimées sont claires, mais pas forcément toujours très neuves: ce livre est sorti en 2002 et, portant sur les attentats du 11 septembre, la plupart des analyses de l'auteur ont depuis été adoptées par le sens commun.

Néanmoins la mise en perspectives de ces évènements est toujours rafraîchissante pour l'esprit; alors que leur exploitation politique continue, surtout aux États-Unis, de même que continue l'hystérie anti-musulmane.

Je n'ai pas très envie de faire un compte rendu plus détaillé du livre. Je vais plutôt continuer à m'en servir comme source (presque) inépuisable de citations pour ce site.

Les conflits ethnico-religieux sont une forme de lutte induite par le capitalisme mondial: à notre époque postpolitique, lorsque la politique est progressivement remplacée par l'administration sociale et le gouvernement des experts, la seule source légitime des conflits est la tension culturelle (ethnique, religieuse). Le regain actuel de la violence irrationnelle est dans le droit fil de la dépolitisation de nos sociétés, de la disparition de la dimension proprement politique, de sa transposition dans les différents niveaux de l'administration des affaires sociales : le phénomène de la violence est traité en termes d'intérêts sociaux, etc. Le reste, intraitable, ne peut nécessairement nous apparaître que comme irrationnelle... Le renversement adéquat, dialectique et hégélien, est ici crucial: ce qui nous apparaît en premier lieu comme une multitude de survivances du passé devant être progressivement dépassées grâce au développement de l'ordre libéral, multiculturel et libéral, est tout à coup perçu, en un éclair, comme le mode même d'existence de cet ordre libéral.

Slavoj Žižek, Bienvenue dans le désert du réel

(attention, ce qui suit dévoile la fin du roman)

L'histoire, racontée à la première personne par son personnage principal, est celle de Charlie Gordon, un handicapé mental qui se fait opéré pour devenir intelligent. "Un teligent" comme il l'écrit dans les premières pages du livre, alors qu'il n'a pas encore pu apprendre l'orthographe. Ce qui rend la lecture de ces premières pages un peu pénible. L'opération sera un grand succès, mais les effets auront une durée limitée.

La description de la vie d'un handicapé semble très réaliste, notamment la cruauté qu'il subit, tant lorsqu'il est enfant que lorsqu'il est adulte. L'histoire se déroulant dans les années 60, le politiquement correct n'existe pas encore, et les moqueries à l'encontre du héros, quand il est encore handicapé, s'expriment ouvertement. Les scènes de vie familiales sont dures elles aussi, et décrivent une mère, obsédée par les apparence, qui ne peut admettre la situation de son fils, puis qui voudra le cacher.

La difficulté de décrire Charlie Gordon avec plusieurs états d'intelligence et de conscience est résolu par l'écrivain en rendant son personnage schizophrène. Même au sommet de son intelligence, l'ancien Charlie est présent dans l'inconscient du nouveau Charlie, devenu un génie. À la fin du roman l'ancien a seulement repris sa place.

L'auteur a une vision positiviste et mécanique du cerveau mis en équation, et la psychologie travaille main dans la main avec la médecine et la chirurgie neuronale. Ce côté science fiction "naïve" est loin d'être désagréable, mais rappelle seulement l'âge du livre, sorti en 1966, lui même une re-écriture par son auteur d'une nouvelle de 1959.

Cela n'empêche pas le roman d'être très bien pensé, très bien écrit et touchant. La chute du héros se passe en quelques pages, soulageant ainsi la tristesse que ne peut manquer de ressentir le lecteur en voyant revenir l'ancien Charlie Gordon reprendre sa place et oublier son autre moi.

On pourrait se risquer à déclarer que le mode libéral prédominant de la subjectivité aujourd'hui se dit homo sucker: dans sa tentative perpétuelle d'exploiter et d'instrumentaliser autrui, homo sucker finit par devenir lui même l'ultime zozo. Lorsque nous pensons nous amuser de l'idéologie actuelle, nous ne faisons que renforcer l'emprise qu'elle a sur nous.

Slavoj Žižek, Bienvenue dans le désert du réel

Vue sur la mer depuis la colline du château

Vue sur la mer depuis la plage de la Réserve

La première photo a été prise depuis le haut de la cascade de la Colline du Château. Par la lumière, le bleu de la mer et les branches d'arbres j'ai essayé de créer l'illusion d'être sur une île lointaine, au milieu d'une végétation touffue. Malheureusement il y a bien trop de bateaux pour que l'illusion prenne - je n'avais vu que celui à voile au moment de prendre la photo. Quant à la couleur de la mer, ce bleu clair n'est pas très courant à Nice: c'est le vent qui, en remuant le fond de l'eau, lui a donné cette teinte.

La deuxième photo a été prise depuis la plage de la Réserve, à contre jour, en fin d'après-midi, alors que le soleil avait déjà décliné. J'aime bien l'aspect un peu chaotique et fin du monde de la photo: l'écume, les rampes rouillées et les rochers qui plongent dans la mer, le reflet du soleil crépusculaire, le phare dans l'ombre. La photo n'est pas très bien prise: il y a une barrière qui dépasse en premier plan en bas à gauche et elle est un peu de travers (le phare n'est pas vertical), mais tout cela ajoute un peu de désordre à l'ensemble.

En résumé le dernier épisode la saison 1 de Twin Peaks c'est:

  • Un innocent piégé, envoyé en prison pour un crime qu'il n'a pas commis;
  • Une adolescente, coincée dans une maison close, sur le point d'être «essayée» par son père;
  • Une suicidée;
  • Deux femmes coincés dans un hangar en feu, et le mari de l'une d'elle qui s'engouffre à l'intérieur pour les secourir;
  • Le principal témoin du crime tué par le père de la victime;
  • Un méchant, le principal suspect, qui reçoit une balle dans le ventre;
  • Un héros principal lui en reçoit plusieurs!

N'en jetez plus! C'est le final le plus complet que j'ai vu, où toutes les intrigues secondaires, et il y en a beaucoup, finissent sur un cliffhanger. Tout cela dans un épisode classique de 48 minutes, avec le même rythme un peu flegmatique, loin de l'urgence que l'on peut trouver dans des séries récentes comme Lost ou Prison Break. C'est la magie de Twin Peaks.

Heureusement que je n'ai pas vu cet épisode à la télévision, et que je ne suis pas obligé d'attendre une semaine ou des mois pour connaître la suite.

À noter que cet épisode a été écrit et filmé par Mark Frost. David Lynch n'y a donc pas participé.

Quelques mots sur mon séjour à Nice, le mois dernier. Cela faisait plus d'un an, depuis décembre 2006, que je n'y avais pas effectué de long séjour, plus long qu'un week-end. J'ai donc essayé de profiter de mes dix jours sur place pour me promener dans cette ville que j'aime bien parcourir à pied.

Le tramway

La principale nouveauté est le tramway. Son passage a travers la ville a modifié l'aspect de bien de rues, d'avenues et de places. Je ne suis pas monté dedans aussi je n'ai aperçu qu'une partie de son parcours. Le côté agréable de ces transformations, pour un marcheur comme moi qui évite de prendre la voiture, est la place accordée aux piétons: les trottoirs sont plus larges.

Ce qui est dommage en revanche est l'absence de toute verdure dans ces nouvelles zones piétonnes. L'exemple le plus frappant est la place Garibaldi. Auparavant cette place était constituée d'un rond point d'un diamètre de trente mètre environ contenant une pelouse au centre de laquelle trônait une statue de Garibaldi, entourée de deux ou trois arbres. La pelouse a été réduite à son minimum pour pouvoir continuer à accueillir la statue. Idem pour les quelques arbres qui ont pu garder un peu d'herbe à leurs pieds, mais en étant séparer les uns des autres.

Le reste de la place est devenu un damier de dalles grises. Le rond point est devenu une intersection entre une route à une voie et le tramway. Il n'y aucune séparation entre la rue et la zone piétonne, à part peut-être une vague nuance dans le grisâtre, et quelques minuscules plot métalliques. Plus d'une fois j'ai vu un piéton sursauter, apercevant au dernier moment un bus ou une voiture lui couper la route ou klaxonner.

La place est encore en travaux. De nouveau arbres maigrelets ont été plantés, dans des trous remplis de terre, là où une dalle à été enlevée. Tout est gris.

C'est l'autre regret des modifications apportées par le tramway: la couleur des trottoirs. Ainsi le boulevard Jean Jaurès a perdu ses anciennes dalles jaune ocre et orange.

Autre lieux de flâneries et de gourmandise

L'autre nouveauté, bien plus minime et plus locale, est le parc de la place Arson, bien agréable pour les enfants. Avec le Château et le Castel des Deux Rois, c'était nos trois destinations principales pour se promener en famille. Les arènes de Cimiez sont aussi un de nos endroits préférés, pour marcher ou courir au milieu des oliviers ou tout simplement pour prendre un café. Mais de là où nous logions il était nécessaire de prendre une voiture.

Sans les enfants, lorsque le soleil tape un peu fort, j'ai toujours aimé me réfugier dans la librairie Privat, l'ancienne librairie Sorbonne. Ses hauts plafonds et le large choix de livres en font un lieu propice à la découverte et la lecture.

Un soir, pour me rappeler ma jeunesse presque passée, nous sommes allés boire une bière dans un pub du cours Saleya. Grâce à la nouvelle interdiction de fumer dans les lieux publics, j'ai enfin pu vraiment apprécier le goût de la bière (à la pêche) dans un pub. En journée, pour prendre un thé ou un gâteau, c'est au Moshi Moshi que je préfère aller, à côté du Mamac. L'endroit est vraiment coloré, la maîtresse des lieux charmante et bon conseillère en thé.

Néanmoins le meilleur endroit pour dépenser ses tickets restaurants reste le glacier Fenocchio. La glace aux noix de macadamia vaut définitivement le détour, plus que celle aux noix de pécan et au sirop d'érable. Enfin, cela reste une question de goût, et de toute façon il faut que j'y retourne pour goûter les autres parfums.